Le Québec façonne l’agriculture par l’innovation. À travers cette série dédiée à ce secteur (2/3), découvrez quelques-uns des entrepreneurs derrière le phénomène AgTech, dont l’objectif est d’offrir de la valeur en rendant les tâches de cette industrie plus simples et plus productives, tout en réduisant l’écart entre le monde de l’agriculture et la technologie.
Motivé à apporter la technologie à l’agriculture, conscient de l’impact positif que cela peut avoir sur l’environnement et le changement climatique, ChrysaLabs propose un outil pour mesurer les propriétés de fertilité du sol avec précision et en temps réel. Cela permet aux agriculteurs et aux agronomes d’augmenter leur rendement et de réduire les coûts d’utilisation des engrais.
Samuel Fournier, co-fondateur et PDG, rappelle qu’un projet lié à la robotique et à la croissance autonome des légumes a conduit au développement d’un capteur capable de mesurer la quantité de nutriments présents dans le sol.
«Benjamin (De Leener) et Gabriel (Mangeat) — également co-fondateurs de l’entreprise — travaillaient sur un projet parallèle, pour se divertir, un farm-bot, un robot qui cultive des légumes de manière autonome. Pour prendre des décisions optimales, nous avions besoin d’informations précises sur le sol pour savoir quand ajouter de l’engrais, quel type d’engrais, quelles actions entreprendre et quand », a expliqué Samuel.
Pour répondre à cette exigence, ils ont cherché les options disponibles sur le marché mais n’ont pas trouvé grand-chose. L’industrie ne s’est appuyée que sur des laboratoires d’analyses chimiques, ce qui est long et coûteux.
Ensuite, l’équipe de fondateurs que complète Jacques Michiels a commencé à mettre en pratique et à appliquer les techniques et les connaissances du génie biomédical, telles que l’imagerie, la gestion des données et l’intelligence artificielle, pour développer une solution qui est aujourd’hui ChrysaLabs.
D’une idée à une entreprise
Bien qu’il y ait eu de nombreuses itérations pour mûrir l’idée de ce qu’est ChrysaLabs actuellement, la fondation de l’entreprise repose sur un contact continu et direct avec l’utilisateur final, démontrant à nouveau l’utilisation d’une approche d’innovation ouverte dans le but de valider le désirabilité d’un produit.
« Le cœur de tout cela repose sur de nombreuses relations et contacts directs depuis le début avec les agronomes et les producteurs. Pour nous, il était important d’avoir une solution qui réponde à un besoin et qui corresponde à la manière dont l’industrie est actuellement développée (c’est-à-dire comment l’industrie peut en faire usage) », a expliqué Samuel.
En plus de sonder l’opinion des utilisateurs finaux au Québec, ChrysaLabs a également consulté le reste du Canada et même des gens du milieu des États-Unis, afin de bien comprendre l’industrie qu’ils ciblaient et de préciser où ils étaient projetés.
Le produit
La sonde portable développée par ChrysaLabs a évolué au fil du temps. Compte tenu du fait que cette solution est constituée de hardware, le produit a subi six générations de prototypes. Le premier était axé sur le test de la capacité de la technologie à capturer les données souhaitées. Les prototypes suivants visaient à améliorer la précision des informations collectées, en réduisant le bruit, entre autres, ce qui parle bien de l’évolution du produit.
ChrysaLabs offre une lecture du sol à 360 degrés, ce qui permet d’avoir une excellente précision lors de la collecte de données sur l’état du sol. « On a une vitre de verre qui va à 360 degrés. Quand on l’insère, ça permet vraiment de capturer l’ensemble d’informations sur 360 degrés dans le sol. (…) Ça nous permet d’avoir accès à plus d’informations pour avoir une mesure plus précise », a expliqué Samuel.
Se mettre à la place du producteur
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les personnes en milieu agricole ne résistent pas à la technologie. Cependant, il est nécessaire de comprendre comment pense l’utilisateur final pour le convaincre d’adopter un nouvel outil dans sa dynamique de travail.
« Un producteur a 40 chances de réussir dans sa vie, dans le sens où il va faire 40 récoltes durant sa carrière complète. Donc, si on arrive avec une solution qui n’est pas 100% prouvée que pour une raison ou autre ça pourrait nuire à ses récoltes cette année, il perd un quarantième de tous ces profits sur sa vie. C’est sûr que pour eux le risque est grand », a illustré Samuel.
Cela nous donne une idée de la posture à prendre pour enlever progressivement les freins à l’innovation dans ce secteur. « (…) Il faut arriver avec des solutions bien préparées, avec des retours sur investissements bien démontrés, des solutions qui répondent aux besoins clairs », a-t-il ajouté.
Compte tenu du fait que la marge de profit des producteurs agricoles est faible, il est nécessaire de développer des technologies et des solutions qui ont du sens et qui ajoutent beaucoup de valeur à ces personnes. « Le principal frein est de réussir à démontrer la valeur exacte de ce qu’on amène. (…) C’est vraiment de prouver la capacité des systèmes qui sont développés et puis mis sur le marché », a exprimé le CEO de ChrysaLabs.
Également, Samuel est convaincu que l’échange d’idées et le contact permanent entre le producteur et l’entrepreneur en intelligence artificielle sont essentiels pour ouvrir plus de portes aux nouvelles technologies dans ce secteur. « Cet échange este essentiel parce que si non ça fait deux milieu qui essaient de se parler, mais qui ne parlent pas le même langage, donc incapable de se comprendre. Et ça devient extrêmement difficile de développer des solutions qui font du sens et de win-win ».